Le passé. Cette réalité éphémère, déplaisante, qui retire la moindre possibilité d'épanouissement personnel, de joie, de bonheur... Emportant au loin les sourires, les tonalités aiguës des rires stridents et sincères de certaines demoiselles. Tel était le cas pour cette Serdaigle. Elle qui priait intérieurement de retrouver le bonheur de vivre d'antan, récupérer son sourire magnifique et adorable qui étirait si souvent ses douces lèvres. La joie lui manque. Désespérant peu à peu, sombrant dans une sorte de dépression, incapable de respirer normalement, de penser aux jours heureux qui l'attendent ou qu'elle a vécue au courant de son existence. Rien à faire. La noirceur gagnait manifestement sur le reste. Ne possédant guère l'habileté requise pour tout oublier, pour agir comme si tout allait bien, la pauvre demoiselle devenait solitaire, reculée, voire même effrayante.

D'horribles images défilaient au sein de son esprit, et ce, en permanence. Plus rien ne semblait avoir de couleur ou même d'énergie. Elle-même n'arrivait guère à comprendre cette futilité que devenait son existence. Le doute, l'absence de courage, l'épanouissement totalement absent chaque jour... Tant de choses quittaient son être, abandonnant derrière une coquille vide, errant sans but, sans la moindre parcelle de joie. Il ne restait qu'un masque faible et presque transparent. Effectivement, lorsqu'elle s'avère être en public, la demoiselle tâchait de rester aussi ressemblante que possible à l'originale, et ce, en dépit de tous ces souvenirs oppressants. Restant sage et souriante envers une grande partie de la population au sein de ce prestigieux château, s'accrochant un rictus le plus sincère possible aux lèvres. Le tout, en éprouvant des difficultés énormes pour ne pas craquer, pour ne pas démontrer publiquement ce que son coeur ressent, la torture que son esprit fait face à chaque instant. Les rires se faisaient de plus en plus rares, les bons moments disparaissaient dans les tréfonds de son esprit, laissant les cauchemars prendre le dessus. Il n'y avait aucun moment où cette jolie serdy profitait pleinement de la vie, refoulant les larmes ainsi que toute cette tristesse qui la caractérise depuis un moment. Il s'avère que ne posséder aucune trace de courage, n'étant aucunement en mesure d'aller à la rencontre de sa demi-soeur, incapable de prononcer les mots adéquats pour exprimer ce qu'elle rêverait tant d'avouer, de crier haut et fort sur tous les toits possibles.

Incapable de faire face à la dure réalité, de réaliser la souffrance grandissante qui prenait possession de son être, Siobhan errait sans but, loin des regards indiscrets. Devoir porter ce masque, dissimuler ce qu'elle ressent réellement... Ce n'est absolument pas dans ses habitudes, encore moins quelque chose qu'elle souhaite démontrer souvent. Par conséquent, dès que l'occasion se présente, elle s'isole, se retrouve avec elle-même, sa conscience... Rêvant de tomber face à face avec Lola, cette fameuse demi-soeur, ne pouvant plus éviter ce moment. Profitant de l'occasion pour enfin dévoiler ce qu'elle est vraiment pour cette Poufsouffle. Cependant, le courage semblait manquer à l'appel, et ce, depuis de nombreux mois, voir peut-être plus encore. Une absence monumentale de conviction, d'effort, d'envie avait pris possession de la totalité de son être. Rien à faire...

Errant telle une âme en peine dans les couloirs du château, Siobhan gardait son regard rivé sur le sol, espérant rester seule assez longtemps pour reprendre le contrôle sur ses émotions, de pouvoir déambuler publiquement quelques petites secondes sans craquer, sans exposer la moindre parcelle d'émotion outre un sourire sincère, exprimant son mal-être tout en transmettant son envie d'être à nouveau heureuse. Du moins, c'est ce qu'elle espérait plus que tout. Les manœuvres qu'elle mettait en place au sein de son esprit tordu s'avéraient détruire ses espoirs au lieu de lui redonner vie. De sombres images ne cessaient de défiler dans son esprit, et ce, bien qu'elle soit complètement seule, qu'elle n'aille personne pour troubler encore plus ses pensées... La solitude. Cela semblait être la seule et unique solution potentielle de fournir une possibilité raisonnable. Toutefois, à ce moment précis, la demoiselle comprit que, peu importe les efforts qu'elle tentera, les moyens de pression que son coeur voudra fournir à son esprit seront d'une inutilité flagrante. Faire preuve d'une telle incapacité l'effrayait, lui faisait honte... Autrefois une femme courage, souriante, adorable, et aimante envers une quantité de gens monumentale, voilà qu'elle devient le complet opposé. Une coquille dépourvue de la moindre trace d'émotion, ne laissant que la tristesse se graver plus profondément sur les traits de son visage...

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De retour au sein de la salle commune des Serdaigles, qui se vidait peu à peu, Siobhan se faufila dans un coin, loin des autres, espérant ne rencontrer personne susceptible de vouloir engager la conversation avec elle. Bien qu'elle face preuve d'un grand courage, l'envie de pleurer devenait de plus en plus irrésistible. Les choses dépérissaient à vu d'oeil pour cette demoiselle... Cependant, auprès de cette solitude qui caractérisait si bien son existence depuis quelque temps, l'absence de chaleur humaine semblait lui procurer une sorte de bien-être. Ainsi, elle ne craignait aucunement de dévoiler ses véritables sentiments, de laisser les larmes ruisseler le long de son doux visage jusqu'à ce qu'elle réussisse à reprendre le contrôle de son être en entier. Cette solitude qui l'appelait jour et nuit, désirant l'avoir comme seule compagnie durant les heures sombres de son existence... La pauvre serdy ne comprenait guère les événements qui survenait chaque jour, ce vide qui grandissait en elle. Ce manque, cette absence... Comment pourrait-elle un jour arriver à combler cela? Une question qui restera bien longtemps sans réponse... Par chance, une sortie au village voisin approchait à grands pas. Une occasion de changer d'air à saisir à deux mains, bien décider à accrocher un nouveau sourire sur son visage. Déterminée à récupérer cette joie de vivre qui la caractérisait si bien depuis le jour de sa naissance. Cette bonne humeur, ces sourires, ces rires... Tant de chose qu'elle désirait récupérer, retrouver afin de redevenir la Siobhan d'antan, de l'époque où les jours étaient ensoleillés et heureux. Une époque actuellement révolue... Toutefois, l'espoir fait vivre. Et cette demoiselle possède l'espoir de pouvoir changer à nouveau.

Installée en plein coeur de ce lieu sécurisant, réconfortant, la demoiselle fila s'asseoir devant les flammes sans la moindre hésitation. La seule chaleur qui parvenait à traverser les pores de sa peau pour atteindre son coeur, ne possédant aucun être en sa compagnie, et ce, pour encore un certain temps. Du moins, c'est ce que son esprit croyait, et quelle grave erreur. Assise ainsi devant le feu, l'esprit anéanti de nouveau par son incapacité à parler ou approcher Lola, les larmes montèrent, exerçant une forte pression sur ses yeux. Ces derniers refusaient catégoriquement de laisser la moindre larme couler, pas ce soir. Cette jeune demoiselle voulait être forte, résister à l'envie de craquer... Cependant, elle n'en pouvait plus. Dissimulant son visage entre ses jambes qu'elle avait remontées jusqu'à sa poitrine, elle laissa ce flot de larmes ravagés son visage qui tentait d'être serein. Les sanglots devinrent de plus en plus forts, sa respiration saccadée... Le contrôle de son corps était disparu. D'aucune manière elle ne pourra récupérer le contrôle, faire cesser toutes ces larmes de couler. Elles veulent couler, alors elles couleront...

Un bruit se fit alors entendre. La porte s'ouvrait afin de laisser entrer quelqu'un. Espérant ne pas être entendu, Siobhan tenta, aux meilleures de ses capacités, de calmer ses sanglots, de reprendre partiellement le contrôle de sa respiration. Ce qui s'avérait être beaucoup plus complexe qu'elle ne le croyait. Les pas approchaient de la salle, de l'emplacement de la demoiselle... Le silence présent au sein de la salle commune ne facilitait aucunement les tentatives de cette serdy désespérée. Relevant légèrement la tête, ce visage qui approchait du sien lui était familier. Aleister, l'une de ses colocataires avec qui les conversations étaient plus que très rares... « Hé, que t'arrive-t-il ? » Suite à ces quelques mots, Siobhan sentit une légère pression s'exercer sur son épaule. Un simple petit contact anodin, qui s'avérait être suffisant pour réconfort son âme, calmer ses sanglots permanents. Tout ce qui semblait lui manquer était de l'attention. Une simple présence près d'elle pour partager tous ces petits moments banals de la vie, autant lorsque le bonheur resplendit de plus belle que lorsque les larmes ruissellent le long d'un visage...

« Rien de grave... » furent les premières paroles à franchir ses lèvres, bien qu'elle n'en croyait pas un traître mot, son esprit tentait de s'en persuader lui-même par la même occasion. « Il n'y a juste... Par place... au courage dans le coeur d'une petite Serdaigle comme moi... » Les mots se brisaient dans l'air de la pièce. Les sanglots provoquaient de petits hoquets, de coupure au sein de ses phrases... Néanmoins, le message semblait se transmettre jusqu'à l'esprit de son interlocutrice. « Je suis désolée... Je ne voudrais pas t'ennuyer avec... mes histoires. »